La deuxième édition du festival « Jazz en Avril » organisé par la très énergique association Canal Jazz, dont le but est d’aller chercher de jeunes talents et de les faire découvrir au public tout en transmettant leur passion, débute ce soir au théâtre de Roanne.
Sur scène, une forêt de pupitres accueille le public nombreux à venir découvrir cet univers de science-fiction dont nous ne ressortirons pas indemnes je vous l’assure.
Ellinoa, alias Camille Durand, est tombée dans la musique à la naissance et communiquait en chantant avec sa mère, chef de chœur, dès sa plus tendre enfance. Passionnée par l’écriture, elle aime composer des œuvres avec une histoire, un fil conducteur, et une belle progression dramatique. Ville Totale, le titre de son dernier album et du concert de ce soir, est une fable écologique et dystopique évoluant sans cesse entre classique, contemporain et jazz.
Nous sommes d’entrée au cœur d’une atmosphère bruyante créé par des bruitages de tous les instruments arrêtés d’une main de maître par Ellinoa, à la fois chef d’orchestre, conteuse, chanteuse, chuchoteuse à la voix magique. La Ville Totale est verticale, froide, son sol est appauvri, les couleurs ont été remplacées par le bleu et le gris de l’acier et du verre. Les humains ont perdu la mémoire du monde, n’ont plus de sentiments derrière leurs écran, l’espace urbain est fourmillant mais inerte, tout est conditionné. Si le malaise est palpable, l’espoir pointe son nez, d’abord par petites touches jusqu’à prendre tout l’espace sonore au fil de la narration. Les murs vont se lézarder, la nature va reprendre ses droits, l’eau ruisselle et la vie va pouvoir renaître. Nous sommes touchés au plus profond de nous par cette histoire qui nous parle, bien entendu, et résonne en nous.
A cet instant, toujours dirigé par la vocaliste, l’orchestre s’enflamme et « grimpe » de demi-ton en demi-ton jusqu’à son paroxysme.
Le quatuor à cordes klaxonne, grince ou réchauffe l’atmosphère d’un son velouté sous l’archet de ses femmes au sourire qui en dit long sur le plaisir de jouer ensemble.
Les vents transforment les sons, improvisent, se fondent avec le reste de l’orchestre ou prennent la parole en solo ou à plusieurs.
Les deux batteries se respectent, soutiennent et se répondent. Le piano sous les doigts de Thibault Gomez accompagne, distord ses sons et encadre toute cette énergie débordante des musiciens avec Arthur Henn à la contrebasse.
Ils sont quinze sur scène mais vous l’a compris, chacun a sa place et son importance et s’exprime tour à tour. Les chorus emportent tout sur leur passage et laissent le public pantois. Les applaudissements fusent. Pour n’en citer que quelques-uns, Pierre Bernier au sax ténor, Illyes Ferfera au sax alto, Sophie Rodriguez à la flûte traversière avec une présence sur scène incroyable. Un très beau solo de violon également soutenu par le piano et la contrebasse.
Bravo et merci aux musiciennes et musiciens pour toute cette énergie partagée ainsi que leur qualité. L’émotion était au rendez-vous et nous l’espérons à très bientôt.
Ellinoa (voix, composition, direction), Sophie Rodriguez (flûte), Guillaume Guedin (clarinettes), Illyes Ferfera (saxophones), Pierre Bernier (saxophones), Paco Andréo (trombone à pistons), Héloïse Lefebvre (violon), Wibad Abdessemed (violon), Séverine Morfin (alto), Juiette Serad( violoncelle), Paul Jarret (guitare), Thibault Gomez (piano), Arthur Henn (contrebasse), Gabriel Whesohal ((batterie), Stéphane Adsuar (batterie).