« En Corps : de belles histoires de Perraud ! »
En arrivant à l’Opéra nous apprîmes que le concert aurait du retard car le batteur Edward Perraud s’étant trompé de train en provenance de l’Ardèche où il vernissait au Théâtre de Privas son exposition photo (oui c’est un « batteur-photographe » !) « Passagers » avec Célia Charvet. Le démarrage était donc reporté à 20h30, mais c’est seulement à cet horaire que le facétieux Edward déboula avec sa valise blanche et son étui à cymbales…Tous se sont mis à l’aider à finaliser son set et régler ses peaux (pas moins de trois techniciens pour l’aider !) et même la pianiste Eve Risser de lui apporter son étui à baguettes et autres ustensiles…le set ne débuta donc qu’à 20h50 bien sonné, après une présentation fleuve du directeur de l’opéra Underground qui aurait largement du faire plus court au vu du retard déjà conséquent…
Le concert est le premier de la résidence durant cinq jours d’Eve Risser dans l’équipement, et pour ce démarrage elle proposait le trio En corps (qui existe depuis 2013) et son « impro organique », avec outre elle-même et le batteur susnommé, le contrebassiste discret Benjamin Duboc. Et c’est parti pour une heure cinq minutes de concert en un morceau unique…une véritable performance pour ces trois musiciens expérimentés tous terrains. Mais la figure émergeante du trio est bien son batteur, le nerveux et virevoltant Edward Perraud, adepte des chemises colorées à fleurs, ce soir, chemise noire sur motifs jaunes du plus bel effet !
La musique est constituée comme un long continuum stellaire et percutant ou les percussions dominent : par moment on dirait presque que nous avons à faire à un ensemble de percussions car chaque instrumentiste utilise mailloches, baguettes et balais pour nourrir cette improvisation tout en délié et en foisonnement. Edward avec tous ses ustensiles (baguettes de toutes tailles, petites cymbales, bol tibétain en étain et scie qu’il utilise sur tous types de supports : cymbales, bords de caisses, etc), sait créer à merveille une ambiance sonore inattendue, tout en frottements, en grincements, en crissements, sur les peaux et les cymbales qu’il malmène (et empile parfois pour les cymbales !) autant qu’il caresse. C’est un des batteurs européens parmi les plus talentueux et intéressants et il est toujours passionnant dans tous ses projets, que cela soit les siens avec son trio « Hors du temps » ou le duo qu’il mène avec Elise Caron, ou dans le Supersonic de son pote Thomas de Pourquery. C’est un des rares batteurs et percussionnistes à savoir raconter une histoire avec toujours des couleurs différentes… c’est un véritable conteur de la batterie, et les contes de Perraud sont toujours surprenants et pleins de rebondissements… il a un univers à nulle autre pareil et c’est pour cela qu’on l’adore ! C’est aussi un bon client visuellement il fait le show et les photographes l’apprécient beaucoup, ce n’est pas Marion qui me dira le contraire !
Ce trio a fourni un beau travail d’improvisation, dommage que les spectateurs de « l’Amphi » (comme on nommait la salle jadis) se soient faits rares car la musique méritait le détour ne serait-ce que pour voir évoluer Edward de près.