19H45 Groove Machine salle Baronissi : La nuit de tous les jazz est généralement annonciatrice du beau temps, de l’été et des festivals à venir. Programmée un peu plus tard que l’année dernière au mois de mai cette année, il n’en reste pas moins que le climat est encore frais et que la saison des pluies s’éternise aussi dans la Drôme. Mais après la mousson, le beau temps est sensé revenir. C’est quand même sous un beau soleil que cette vingtième Nuit de tous les jazz(s) démarre sur l’esplanade avec Tigre et Canapé. Cette fanfare jazz lance la soirée et amène dans les salles un public familial, d’amateur et de passionné. Vingt ans, c’est l’âge de raison et l’âge adulte, mais toujours avec ce petit grain de folie de la Nuit de tous les jazz(s) du Train Théâtre !
C’est de la salle Baronissi que s’échappent des mélodies du clavier, une rythmique funk à la guitare, soutenues par la rythmique efficaces et robuste de la basse électrique et de la batterie. Les cuivres, composés de la trompette et des deux saxophones viennent claquer à l’unisson sur la rythmique. C’est bien une ambiance Soul et Rythm’Blues que nous propose Groove Machine. Et cela se poursuit tout au long du set avec des intro sur les accords du clavier ou des riffs funky à la guitare. Les rythmiques entêtantes donnent l’impression que les morceaux n’en finissent pas, ce qui donne la place à chacun de proposer un solo. On retrouve parfois l’ambiance des musiques de séries policières et l’on a l’impression de rouler à bord d’une décapotable au bord de l’océan à l’heure du coucher de soleil. C’est parfait pour se mettre dans l’ambiance dès le début de la soirée.
NB : Les noms des musiciens ne sont pas annoncés.
20H00 Julia Richard Grande scène : Direction la grande salle après avoir traversé l’esplanade et le hall du train Théâtre pour le set de Julia richard. Cette jeune contrebassiste et chanteuse est accompagnée Philippe Dallemagne à la batterie et d’un pianiste. Sur des compositions personnelles, ils proposent un jazz à la fois classique, mais avec quelles touches de modernités. Le pianiste et la contrebassiste jouent sur des instruments acoustiques, mais également sur des instruments électriques. Les claviers et la basse électrique donnent à ce mélange des sonorités qui enrichissent ce jazz qui tend parfois vers la Soul et la Pop. Les morceaux dynamiques sont alternés avec des mélodies Pop Jazzy ou des ballades blues. Les timbres de la batterie sont riches avec un jeu sur les tambours et les cymbales. La voix a une jolie tessiture et se fait souvent puissante. Le chant des titres en anglais est posé. On apprécie un fort engagement de la chanteuse et des musiciens. Ce groupe est une belle découverte.
NB : Le pianiste annoncé n’est pas le musicien qui a joué.
21H00 Michtology Salle Baronissi : Cette fois ce sont les notes qui virevoltent de la salle Baronissi, lorsque les quatre musiciens de Michtology croisent les cordes. Et il y en a des cordes avec trois guitares d’Ivan Gorlier, Grégory Aubert et Nicolas Gavotto et la contrebasse de Marc de Sousa. C’est le répertoire classique du Swing Manouche que nous proposent les musiciens. Les rythmes et les mélodies alternent avec des sonorités de cordes variées. La guitare rythmique et la contrebasse assurent une pompe solide et puissante qui pousse les guitares solo à se surpasser. Les morceaux swing et les ballades dynamisent le public nombreux qui danse debout devant les portes de la salle comble. Encore une belle ambiance pour cette salle, Michto les cordes !
21H15 Marion Rampal Grande scène : Retour sur la grande scène pour cette vingtième nuit de tous les jazz, cette fois pour la tête d’affiche de la soirée. Marion Rampal est annoncée comme guest ce soir avec ses chansons en français et en anglais. C’est Mathis Pascaud à la guitare électrique qui donne un ton blues folk à la musique. La contrebasse de Simon Tailleu accompagne avec une rythmique dansante et le remplaçant de Raphaël Chassin à la batterie rythme délicatement souvent aux balais ou aux mailloches. Le style de la Louisiane est affirmé dans un titre inspiré d’un bal Cajun ou Zydeco comme le rappelle la chanteuse. Les chansons interprétées en français en font des ballades blues. L’interprète avec sa gestuelle théâtrale, fait penser à une Môme Piaf bluesy. Ses gestes sont mesurés et collent très bien à la musique. Elle emprunte une ballade à Bob Dylan, Don’t Think Twice, qui permet au contrebassiste de proposer un solo mélodique. Sur d’autres Blues, les tambours joués aux mailloches semblent dialoguer avec les riffs de guitare jazzy. Un solo délicat sur les tambours et la caisse claire donne une ambiance de percussions. La chanteuse revient à la chanson en français avec une composition, D’où l’on vient l’hiver, qui est un hommage à sa grand-mère Madeleine qui lui à enseigné les noms des oiseaux, des coquillages où des plantes. L’intimité du texte nous plonge dans l’émotion. L’archet de la contrebasse porte délicatement la mélodie de la chanson, tandis que les mailloches et la guitare soulignent la tendresse de la chanson. Avec sa sensibilité et la délicatesse de ses accompagnateurs, la chanteuse nous fait partager l’émotion du sud des Etats-Unis et son univers personnel. Nous avons vécu un grand moment d’intimité dans la salle principale.
22H15 Trio Atrato Salle Baronissi : Dernier passage dans la salle Baronissi pour cette nuit du jazz avec un univers complètement différent des deux précédents. C’est l’ambiance du Trio Atrato emmené par la fougue du pianiste Adlane Allouche, du batteur Jean-Baptiste Baldazza et du bassiste Félix Semet. Cet univers est celui de l’Amérique Latine dans une version festive avec la basse et le clavier qui sont électriques. Les influences sont variées comme les rythmes cubains ou brésiliens avec une reprise du pianiste Bebo Valdes notamment. Une partie du répertoire est dansante avec la batterie qui utilise des percussions sur lesquelles le piano peut faire danser ses mélodies. La basse assure une rythmique solide et dansante également. D’autres morceaux sont calmes avec des ballades aux couleurs latinos. Ce set dynamique nous réveille et nous fait voyager.
22H30 Pouëtte Duo Train Cinéma : La salle du Train Cinéma est également sollicitée pour les concerts de cette nuit du jazz. Plus petite, la capacité et la scène de la salle sont propices aux petites formations. Lina Belaïd au violoncelle et Antoine Girard composent le Pouëtte Duo qui nous propose une musique improvisée aux sonorités folkloriques du bassin méditerranéen et du centre de l’Europe. Les mélodies de violoncelle font écho aux rythmiques de l’accordéon. Les différentes influences sont jouées par la violoncelliste parfois à l’archet parfois en pizzicato. L’accordéoniste donne un style tsigane notamment avec Gypsy roots, titre qu’il a composé pour le groupe Les Doigts de L’homme. L’interprétation à deux de ce morceau composé pour un ensemble est impressionnante. Le jeu de la violoncelliste est bluffant. On a l’impression d’entendre à tour de rôle la contrebasse, la guitare et le violon tsigane ! Ce voyage en Orient se poursuit avec l’interprétation de suites Gréco-turques sur des rythmes 8/9. Les musiciens nous précisent que l’héritage musical des deux peuples est le même. Cette joute musicale et amicale entre les deux interprètes est d’une virtuosité enthousiasmante.
22H45 KLT & Jessy Elsa Palma Grande Scène : Il est déjà tard et la nuit s’approche de sa clôture avec le groupe KLT & Jessy Elsa Palma sur la grande scène. La tessiture de la chanteuse Jessy Elsa Palma permet d’aborder un répertoire varié, du Jazz à la Soul en passant par la Pop. Kevin Larriveau au piano, Gabriel Gorr à la contrebasse et Théo Schirru à la batterie proposent un accompagnement de trio jazz classique et acoustique qui contraste parfois avec la voix Afro, Soul et Pop. Cela donne de la profondeur aux titres. Tous les styles sont maîtrisés et les musiciens swing avec la voix de la chanteuse. Le répertoire comprend des compositions et des reprises qui sont toutes interprétées sur des rythmes qui invitent à danser, ce que fait la chanteuse en chantant. Dans un esprit bienveillant et de partage, la chanteuse embarque le public dans l’interprétation d’un canon. Les auditeurs sont séduits de participer au chant, ce qui rend le final festif et joyeux pour terminer cette vingtième Nuit de tous les jazz(s). Porté par l’ambiance, le public réclame un autre titre, la chanteuse s’accompagne à la guitare sèche amplifiée pour ce rappel en douceur.
Jean-François Viaud
J’aime beaucoup arriver de bonne heure dans les soirées jazz et tout particulièrement ici : trois scènes, les balances, il y a du son partout, des sourires, des rencontres et doucement, l’ambiance monte, j’adore cela.
D’autant qu’à Portes-Lès-Valence, ce jour, on dirait le sud.
La grisaille est loin, tout n’est qu’illusoire mais cela fait rudement du bien.
Chacun son sud, je vous en reparlerai plus tard.
Pour une intro à la hauteur de cette nuit de tous les jazz(s), Tigres et Canapés s’installe sur le parvis. Batterie, trompettes, saxophone ténor et soubassophone (et également trombone pour le batteur).
Les tigres bondissent, cuivres électros, et savent aussi se jouer charmants comme chats sur canapés.
Les compositions sont des deux complices, j’ai nommé Gaby Schenke, sax ténor et Léo Jeannet, trompette. Sans oublier Valentin Meylan à la trompette, Eric Exbrayat au soubassophone et Nicolas Serret à la batterie. Festif à souhait ce jazz, moderne, rock, est travaillé et tigré jusqu’au look, la fanfare cuivrée de Tigres et Canapés nous offre un opus plein d’énergie et d’humour.
Autour des musiciens, le parvis se remplit, de sourires beaucoup. Excellent début de la Nuit De Tous les Jazz(s) h#20.
Une heure plus tard, je choisis Chacun Son Sud au Train Cinéma (eh oui) pour un excellent voyage évasion. Il y a Richard Posselt à l’accordéon, Anthony Gutierrez à la contrebasse et Olivier Large, trompettiste et compositeur. Ces trois musiciens drômois sont tous déjà connus des lecteurs Jazz-Rhone-Alpes.com.
Je suis restée là, emportée d’histoires en histoires passant de Pizzica à Rani, de Chez Peter Pan à Regarde, magnifique jusqu’à Dragon, un dragon actif et mobile.
Pizzica, c’est une histoire sans fin issue de la grande tradition, tarentelle italienne où on danse jusqu’à ne plus en pouvoir pour exorciser le mal que l’on porte en soi. Et tournent tournent les danseurs, les danseuses. Sortez de vos corps le malin. Il est si bon de partir loin avec cette musique et cette folle histoire.
Ce trio, ce sont les couleurs de la musique et du monde, ou comment regarder et écouter le souffle recherché de l’accordéon, unique, inattendu et, sur un solo accrocheur, le rythme du contrebassiste juste avant le retour de la trompette. La musique de Chacun son Sud apaise, guérit et relie. Merci merci. Quel voyage !
Je fais un court passage avec Mitchtology, jazz manouche, pour un swing très goûteux joué par quatre musiciens qui ont fait le choix de mêler guitares acoustiques et électriques.
Benoit Convert Solo
Peu de public dans la salle mais jouer à quinze minutes de Marion Rampal, l’invitée d’honneur, pas facile. Pourtant j’y suis et j’ai bien envie de partager ce temps solo avec ce guitariste. Pantalon rouge, chemise à motif, sa main aux doigts longs posée sur le manche de sa guitare « Merci d’être là » nous dit-il.
Sans tarder, un rien surnaturel, Benoît Convert jouera Kintsu. Le kintsugi c’est l’art de réparer les porcelaines à la feuille d’or, embellir, redonner de la valeur, un art retransposable pour les blessures de l’âme humaine. Suivie d’une improvisation, sa musique nous fait du bien. Entre éclat blues et impro, il joue aussi Brad Mehldau un bel arrangement du pianiste. La salle se remplit à nouveau ; Benoît poursuit avec une jolie ballade Sur le ciel de Crimée créé lors d’une tournée avec Biréli Lagrène. Il joue aussi du Olivier Messiaen, avec un arrangement pour sa guitare remarquable.
Tous ces arrangements font de Benoît Convert un sacré musicien, un guitariste dont il est bon de croiser la route. Il joue du jazz, oui mais pas seulement. Magnifique set.
Florence Cavagnat