14/06/2024 – « French Connection » David Bressat & Guests au Solar

14/06/2024 – « French Connection » David Bressat & Guests au Solar

Pour la fin de saison, la scène de jazz stéphanoise du Solar s’est parée de rengaines, ritournelles populaires dont David Bressat a prouvé qu’elles portaient encore beau. Le pianiste lyonnais venait en trio présenter « French Connection (volume 3) », un opus tout chaud sorti le 7 juin dernier (voir la chronique de Bernard Otternaud).
Comme pour les deux précédents, il était accompagné de musiciens éminents. L’insigne Charles Clayette à la batterie, un complice de vingt ans habité de virales pulsations. L’exigeant et inventif Thomas Belin à la contrebasse, qui dirige par ailleurs son propre quartet.

Mais pourquoi ce désir de réarranger des chansons du répertoire français ou des pièces classiques ? Pour David Bressat, « il s’agit d’une réflexion sur le jazz en général, qui s’est nourri de blues, d’influences afroaméricaines ou européennes, ce qu’ont d’ailleurs fait les jazzmen américains depuis toujours, créant des standards à partir de mélodies populaires ». Ce qui l’intéresse d’ailleurs le plus, ce sont justement ces mélodies, portes ouvertes sur le patrimoine musical français.

Nous voilà donc à rêver de Bohême avec Aznavour, à fredonner Padam Padam avec Piaf, à croire que C’est si bon avec Distel. Enfin, il fallait parfois avoir l’oreille très musicale pour reconnaître les thèmes, tant les arrangements, travaillés au couteau de l’impro, peignaient les airs de façon surréaliste, mixant les couleurs sonores façon puzzle. David Bressat lui-même se  prenait au jeu, demandant chaque fois au public de quelle chanson il s’agissait. Ce petit quizz convivial ne faisait pas oublier qu’on était dans le sérieux, du grand art.

En première partie, le trio n’interpréta que quelques-uns des dix titres de ce troisième album, rafraîchissant aussi le public d’une Douce pluie composée par David Bressat il y a une dizaine d’années, avant de l’enflammer avec Besame mucho. Tout cela était impec, efficace, à la fois exigeant et décalé, sans parler de la fluidité évidente des liens entre les chorus et même entre les silences.

Puis il y eut une seconde partie, aussi originale que différente, avec une première mondiale, la re-création d’un classique de Gabriel Fauré, Après un rêve. Trois invitées avaient rejoint le trio. Maud Fournier au violoncelle, Caroline Bugala au violon et Luna Odin-Garcia au chant. Ce diable de sextet a fait grimper la température d’un cran, avec notamment la voix divine de la jeune Luna, issue autant du classique (Maîtrise de l’Opéra de Lyon) que du jazz ou du reggae. Elle a commencé fort avec La chanson de Maxence de Michel Legrand, un compositeur dont elle adore les mélodies, a poursuivi avec Le petit jardin de Dutronc ou La belle vie de Distel. Que dire ?
Placement subtil et juste de la voix, naturel incroyable, élégance de la nuance, frisson retenu, cœur ouvert, totale osmose avec les musiciens… Bref, ça s’appelle de la haute-couture mais ce serait offert à tous. La violoniste  n’était pas en reste avec un sens inné de la pulse et un archet rieur, sur des arrangements aussi surprenants que nouveaux.
Cette dernière soirée sentait donc les étés, ceux d’hier et celui à venir. Y aura-t-il un quatrième opus ? Pourquoi pas ?

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