27/06/2024 – Nile Rodgers de Chic aux Nuits de Fourvière

27/06/2024 – Nile Rodgers de Chic aux Nuits de Fourvière

Croisière au fil du Nile

Comme déjà au théâtre antique de Vienne en 2013 puis en 2016, le plus successful des producteurs de funky-disco depuis un demi-siècle n’a eu aucun mal à faire groover celui de Fourvière avec le même répertoire. Soit un inlassable continuum de méga tubes en forme de juke-box vivant, retraçant l’incroyable carrière du guitariste Nile Rodgers tant avec Chic qu’avec les nombreuses stars auxquelles il a apporté sa fameuse patte gagnante. La courte première partie laissée à Sly Dee (voir ici), le dernier projet du bassiste Sylvain Daniel, nous aura permis d’entendre en live -mais pas dans les meilleures conditions- quelques morceaux de cet album qui nous a tant plu.

En relisant mon papier sur le concert de Nile Rodgers & Chic à Vienne en 2016, je pourrais quasiment faire un copié-collé à une exception près, puisque je concluais en disant que c’était peut-être l’ultime occasion de les entendre sur la scène du Théâtre Antique où nous avions pu enfin les voir pour la première fois en 2013. Huit ans plus tard pourtant, alors que le plus capé des guitaristes et producteurs de funky-disco s’est visiblement très bien remis d’un cancer, c’est cette fois sur la colline de Fourvière que l’on retrouve avec bonheur l’homme aux mains d’or qui aura soixante-douze ans en septembre prochain, avec la même équipe et pour le même répertoire. Le cofondateur de Chic, avec l’éminent bassiste Bernard Edwards décédé en 1996, a toujours autour du cou sa légendaire Fender Stratocaster de 73 baptisée «Hitmaker» tant elle aura imprimé une foultitude de hits qui nous ont accompagnés et fait danser depuis 1977 et jusqu’au mitan des eighties. Avec ce fameux riff mythique,qui est devenu le plus samplé de la planète en un demi-siècle de carrière au top, avec en cumulé plus de cinq-cents millions d’albums vendus à ajouter à quelque quatre-vingts millions de singles, usés jusqu’à la corde sur les platines de tous les DJ’s du monde. Qui dit mieux ?

 

Un Juke-box vivant idéal pour le dance-floor

On savait donc parfaitement à quoi s’attendre et c’est donc sans surprise que d’emblée les gradins de pierre se sont enflammés au son d’un long medley d’ouverture où s’enchaînent pour quelques refrains qui font tilt, Le Freak évidemment, Everybody dance bien de circonstance, I want your Love et son gimmick cuivré où la trompette vient chorusser en front-line. Mais si bien entendu les titres de Chic sont présents et disséminés dans la set-list, le répertoire est tout à la gloire -légitime- de Nile Rodgers, hommage à son parcours, ses rencontres, ses compositions, déroulé tel un CV mirifique et agrémenté de projections photos sur l’écran de fond de scène. En noir et blanc ou en couleurs sépia, souvenirs de studio avec tout le gratin qui a défilé pour bénéficier de la griffe intemporelle du guitariste et générer des records de distinctions et de ventes. Comme Diana Ross, dont voilà successivement I’m Coming Out avec un solo de sax accrocheur puis l’irrésistible Upside Down où comme à l’habitude les vocalises des deux choristes, et notamment Kimberly Davis, assurent à fond.

La fête est fraternelle et déjà plus joyeuse qu’au discours politique que nous ont obligatoirement assené deux syndicalistes  «représentants de la culture et du spectacle» en préambule, entre copieuses huées et réactivité des applaudissements, qui en dit long sur la fracture grande ouverte entre deux pôles sociologiques à quelques jours d’un scrutin inédit. A se demander si le mega hit de Sister Sledge qui suit, l’infernal We are Family n’est pas qu’une douce illusion bien utopique…

It’s only fun

Mais on est là avant tout pour le fun, et ce n’est pas la petite averse qui a  crachoté vers 23h qui fera retomber l’ambiance développée par ce véritable juke-box vivant. Car Nile Rodgers c’est encore Like a Virgin et Material Girl de Madonna , avant quelques couplets de Bowie très bien interprétés par le pianiste… Un zest de Beyoncé, et voilà l’acmé du dance-floor avec Get Lucky des Daft-Punk. L’occasion pour le leader, qui s’épanche beaucoup et un peu trop longuement au micro ce soir, de dire combien leur séparation lui a brisé le cœur. Si parler lui permet de souffler, le groove reprend de plus belle, toujours avec Sister Sledge, puis le Notorious de Duran Duran avec le gros slap du bassiste Jerry Barnes. Sur fond de projections colorées très psyché et seventies, c’est encore Spacer de Sheila & B. Devotion, avant que la plupart des derniers morceaux du show -très à l’américaine- soit dévolus comme à l’entame à Chic, avec Dancing, Chic Cheer, My Forbidden Lover. A l’exception de Let’s Dance de Bowie qui vient précéder un Good Times de rigueur et longuement étiré pour finir en beauté.

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