Soirée Blues éclectique qui aborde plusieurs facettes du blues, du plus traditionnel en passant par la soul et le rock avec une pointe de folk et de gospel avec deux artistes confirmés Shakura S’Aida et Robert Finley et en complément pour remplacer Popa Chubby la première sur scène d’un projet conçu par Manu Lanvin en hommage au rocker Texan Calvin Russell avec de nombreux invités.
Shakura S’Aida
Bien connue des amateurs de blues Rhônalpins après des passages remarqués ces dernières années au Rhino-Jazz et à Jazz à Vienne, Shakura S’Aida incarne parfaitement la chanteuse de blues qui a réussi à mélanger blues, soul, funk, gospel et maintenant aussi folk rock avec son dernier album Hold on To love paru en 2022 ; grâce à des capacités vocales étonnantes elle prend toute sa dimension sur scène ou elle est particulièrement à l’aise cherchant en permanence à impliquer son public.
Ce soir, disposant de moins d’une heure pour convaincre, elle a brillamment relevé le défi y compris celui de faire participer public féminin et public masculin sur le titre Taste like Honey tiré de son dernier album. Autre grand moment de son set, la reprise folk-blues du Heart of Gold de Neil Young (album « Harvest ») ou ses guitaristes font un travail étonnant sur guitares acoustiques. Elle aura encore le temps pour son titre composé avec Keb Mo, Clap Yo Hands and Moan ou elle met un maximum de passion et d’émotion toujours bien servi par ses musiciens.
En résumé : une grande dame une nouvelle fois totalement convaincante dans ce set compacté.
Shakura SʼAida: voix ; Tristan Clark: guitare ; Maurice Gordon: guitare ; Roger Williams: basse ; Aubrey Dayle: batterie
Robert Finley
Avec Robert Finley (né en 1954), c’est toute une page de l’histoire du blues de Louisiane qui s’écrit devant nous. Il a baigné très tôt dans le gospel et la guitare qu’il a pratiquée dans un orchestre de l’armée américaine en Europe. A son retour en Louisiane, il a alterné musique et menuiserie. Devenant aveugle, il est pris en charge en 2015 par la Music Makers Relief Foundation qui l’inclue dans ses tournées. Il enregistre son premier album, « Age don’t mean a thing » en 2016 à l’âge de soixante-deux ans. Appuyé par le leader des Black Keys, Dan Auerbach, il enregistre un nouvel album en 2017, « Goin’ Platinum ! » avant de partir en tournée avec Dan Auerbach. En 2019, il participe jusqu’aux demi-finales de America’s got talent (un The Voice américain !) sort un nouvel album en 2021 et un quatrième en 2023, « Black Bayou » beaucoup plus blues que les précédents et qui lui ouvre les tournées internationales.
Grand dans un costume noir impeccable, lunettes noires, barbichette blanche, flanqué d’un grand chapeau aux couleurs et étoiles américaines, grandes bottes assorties au chapeau, Robert Finley vient défendre sur scène son dernier album, avec le soutien d’un power trio (basse, guitare, batterie) efficace et saignant, complété par une choriste qui n’est autre que sa propre fille et qui se comporte sur scène comme une assistante de vie veillant sur ses déplacements, lui soufflant les titres et lui avançant un siège quand c’est nécessaire. Toujours en mouvement, se baissant fréquemment, pointant du doigt le public, il enchaine les titres de l’album entrecoupé de quelques histoires personnelles. En début de concert, très blues prend place Livin’ out a suitcase et à la fin plus soul, c’est au tour d’un titre fort de l’album Sneakin around où la voix de Robert Finley démontre toute sa puissance.
Un concert à vivre et à savourer comme celui d’un encore authentique bluesman venu tout droit des bayous louisianais.
Robert Finley: voix ; Christy Johnson: chœurs ; Liam Hart : guitare ; Ollie Hopkins: basse ; Charlie Love: batterie
TRIBUTE To CALVIN RUSSELL par Manu Lanvin avec Beverly Jo Scott, Theo Charaf , Gerard Lanvin, Johnny Gallagher & Neal Black.
On connaissait les liens d’amitiés qui unissaient le bluesman français Manu Lanvin et le folkman-rocker texan Calvin Russell jusqu’à la disparition de ce dernier en avril 2011, après une vie d’excès pourtant jalonné de nombreuses pépites musicales. A l’heure de rendre hommage à Calvin Russell, Manu Lanvin avait donc toute sa légitimité pour conduire le projet qui a d’abord pris la forme d’un concert hommage en 2022 (à La traverse à Cléon) avant de devenir un album de quatorze titres sorti le 7 juin 2024 et réunissant une bonne douzaine de contributeurs.
Le concert de ce soir à Vienne est la déclinaison en avant-première et en live de l’album. Outre Manu Lanvin en MC et aux guitares, se sont succédé sur scène le guitariste americano-viennois Neal Black pour une reprise apaisée de Time Flies ; c’est le guitariste irlandais Johnny Gallager qui se présente ensuite pour reprendre Trouble. Le jeune bluesman lyonnais Théo Charaf propose Nothin’ can save me à la guitare acoustique et en arrière-plan quelques accords de pedal steel guitar.. C’est ensuite au tour de Gérard Lanvin, acteur et père de Manu de proposer 5M2 un texte qu’il avait écrit pour Calvin Russell qui avait connu la prison, et qui ici avec quelques traits d’harmonica prend une dimension saisissante. C’est à la seule représentante féminine du projet Beverly Jo Scott qu’il revient de donner sa version de Crossroads et c’est aussi magique que bouleversant avec son accompagnement à dominante acoustique. Pour le final, tout le monde se retrouve derrière Manu pour une reprise à plusieurs voix de Too Old to grow up now morceau qui est interprété par Charlélie Couture sur l’album et c’est justement à nos yeux la seule absence que l’on peut regretter ce soir pour que la fête soit totale.