14/08/2024 – « Rouge » Madeleine Cazenave Trio à Mollans-sur-Ouvèze pour Parfum de Jazz

14/08/2024 – « Rouge » Madeleine Cazenave Trio à Mollans-sur-Ouvèze pour Parfum de Jazz

Début du concert, Madeleine Cazenave pose le décor : deux notes d’un morceau (en quinte) nous ouvrent la porte d’un univers musical minéral, qui s’épanouit parfaitement dans l’écrin de verdure du théâtre de Mollans. Du tréfonds de la terre parviennent les harmoniques du contrebassiste Sylvain Didou, qui se fondent avec les sons subtils des machines du batteur Boris Louvet. Petit à petit, la musique se déploie en arabesques, tantôt aérienne, tantôt souterraine, puis la masse sonore se densifie avec Granit sans jamais tomber dans la surcharge. Nos trois alchimistes semblent jouer à parts égales. Les arpèges de Madeleine Cazenave tapissent une trame harmonique sobre où chacun de ses compagnons musiciens tisse une part de la toile. Les thèmes se superposent, se poursuivent en fugue, s’entrelacent, ondulent. Ils atteignent une gravité qui m’évoque Henry Texier parfois.  

Avec Petit jour, c’est comme un réveil en douceur, puis une replongée dans un dernier rêve, celui qui vous rattrape et qui, se sachant en sursis, redouble en intensité puis vous laisse échoué sur la rive, encore tout ensommeillé. 

Madeleine Cazenave pose des mélodies envoûtantes, qui m’embarquent, à mon insu, pour une traversée dans un univers parallèle. Le très évocateur morceau en hommage au film de Miazaki, princesse Mononoké, offre une ode à la forêt, à un monde menacé dont une meute de Louves se fait protectrice. Le son s’épaissit, la caisse claire semble vouloir soutenir les combattantes de cette armée canine dans leur lutte en rythmant leur avancée.

Feu démarre sur une courte mélodie de style très classique au piano, qui rapidement s’étoffe. La matière semble réagir sous l’effet des flammes, au fur et à mesure qu’elles gagnent du terrain. La batterie devient plus métallique, la lame de l’archet vient torturer le bois de la contrebasse qui geint, crie de plus en plus fort.

 

Pouvoir hypnotique des ostinatos, jeu délicat de Boris Louvet qui frotte ses peaux avec les balais, musicalité de la contrebasse de Sylvain Didou. Notes parfois étouffées du piano arrangé avec des bandes de ruban adhésif, le trio brouille les frontières entre les genres musicaux, et entre réel et imaginaire. Alors que le son de la contrebasse se fait percussif dans Strawberries in the dark, Sylvain Didou frappant les cordes avec son archet, Boris Louvet caresse sa batterie de ses baguettes avec beaucoup de délicatesse.

Le trio Rouge est composé de trois orfèvres, qui travaillent la matière sonore avec beaucoup de précision. L’apparente simplicité des thèmes joués me semble cacher un désir d’épure, le désir d’approcher la « quinte essence » de la musique, intervalle que Madeleine Cazenave semble affectionner particulièrement.

Et la fin du concert me laisse,, entre deux mondes, comme après un « vermeilleux »* rêve qui s’éteint..

 

PS :Le trio Rouge a été fondé par Madeleine Cazenave en 2018.
Chacun des musiciens a exploré des univers différents : Madeleine Cazenave s’est intéressé et a réalisé des musiques pour des spectacles de magie nouvelle ; Sylvain Didou a composé des musiques pour des spectacles de cirque ou de théâtre, ainsi que des musiques de film.
Boris Louvet joue tout style de musique, jusqu’au métal, et est également désigner sonore de jeux vidéo.

 

*: le dernier album de Rouge s’appelle « Vermeilles »

 

 

 

 

 

 

[1]Le dernier album du trio s’intitule Vermeille.

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