
Après le premier morceau Camille Thouvenot nous rappelle l’origine du terme « Mettà » qui vient du sanscrit qui signifie entre autre bienveillance, amitié. Terme qui s’est imposé quand il a composé ce trio avec Christophe Lincontang à la contrebasse et Andy Barron, la crème de la crème des accompagnateurs et plus encore. Ce trio a deux albums qui ont fait mouche à son actif « Crésistance » sorti en 2020 et le tout récent « Intriospection » (voir la chronique de Michel Perrier)
Le set piochera dans les titres des deux albums.
Cela débute avec 7 years (Crésistance) dédiée à sa compagne en rapport avec la « crise des sept ans » qu’ils ont enfin passée.
Suit une première adaptation d’un standard Whisper Not de l’immense Benny Golson d’après la version de Keith Jarrett et que l’on retrouve dans « Intriospection ». Sous les doigts de Camille, ce tube prend une nouvelle jeunesse tant les rythmes sont bousculés et les accords parfois surprenants.
Autre standard, autre réappropriation : My favorite things également dans « Intriospection » qui démarre sur les chapeaux de roue avant de céder la place à un solo de contrebasse qui prend le temps de se poser. Puis le piano réapparaît lumineux et clair.
BBB (for Esbjörn) (Intriospection) est une ballade inspirée de Believe, beleft, below de E.S.T. Camille précise qu’il s’agit bien d’une composition. Effectivement, on retrouve ici l’esprit du génial et regretté pianiste suédois. Un hommage d’un pianiste à l’un de ses maîtres. Respect !
Avec Trouble in Dissay (Intriospection) on retrouve bien le style énergique du trio, composition enlevée et batterie inventive. C’est un peu la patte d’Andy Barron avec son style efficace et si peu orthodoxe. Ce morceau est justement dédié à Andy.
Massimo (Intriospection) est une composition dédiée au filleul de Camille. Le thème est calme et permet à Christophe Lincontang de prendre un nouveau chorus.
23power (Intriospection) est dédié aux voisins de l’immeuble de Camille. Visiblement, une belle et bonne énergie règne parmi ces voisins (on sait que Camille organise régulièrement des concerts privés chez lui). On note les allusions plus que soutenues au titre phare d’Ahmad Jamal, Poinciana.
Pour Stella by Starlight (1944, Victor Young), Camille invite son nouvel ami, l’ingé-son, Pascal Billot à qui est laissé une large place avec son sax alto. Andy ne laisse pas sa part aux chiens. Ça swingue grave !
Vous en connaissez des artistes qui jouent un morceau en l’honneur de leur maison de production ? C’est le cas avec Jinrikisha (Intriospection) une composition de Joe Henderson qui est également le nom de leur maison de production (voir ici). Ça va vite, c’est élégant. Un bop qui cache son nom.
Les Couleurs d’automne (Crésistance) est un morceau qui monte imperceptiblement en tension. On ignore où cela s’arrêtera. Toujours est-il que cela comble d’aise Christophe qui se donne à fond avec force sourires à destination de ses acolytes.
Donkey run (Intriospection), ou « la course folle de l’âne » en souvenir de l’animal qui a accompagné sa jeunesse. On y retrouve un des péchés mignon de Camille à savoir des effluves de reggae matinées de citations de quelques standards. Et une main gauche qui répète à l’envi un thème toujours pareil. Encore une composition qui déménage.
Fin du set avec Indifférence , LA valse de Tony Murena, attaquée ici sur un tempo très vif. Rapidement l’interprétation s’envole vers d’autres cieux, sa composition Déménagement , avant de revenir presque « sagement » dans le thème.
Le public est sous le charme. Les applaudissements sont soutenus. Même pas besoin de descendre de scène : Le rappel se fera sur leur version de Caravan. Encore une fois un bijou de réappropriation avec parfois des accents boogie, et surtout une batterie qui ronfle à souhait dans un chorus dont Andy a le secret. Bien sûr, le piano joue en excès de vitesse et la contrebasse suit.
La salle était pleine, rare pour un dimanche soir, le public comblé.