
Grande première pour Canal Jazz, un concert inclusif dans la magnifique salle des fêtes de Thizy, bâtiment classé aux monuments historiques. Nous accueillons neuf établissements d’accueil pour personnes en situation de handicap mental, de toute la région roannaise et au-delà. En tout quatre vingt-quatorze personnes handicapées, une trentaine d’éducateurs et le même nombre d’habitants de Thizy. Organisation parfaite menée par Philippe Labrosse, lui-même chef de service d’un foyer de vie à Thizy, un des bénévoles de l’association.
Sur scène, en duo, Pierre Tereygeol au chant et sa guitare, un couple qui fonctionne vraiment bien avec fluidité, l’un donnant la parole à l’autre et vice-versa.
Tout le monde est installé et la guitare égraine une mélodie calme qui captive d’entrée tous les spectateurs, avant que la voix, dans les aigus, ne se joigne à l’instrument. Beaucoup de variations dans cette composition de Pierre, Silent Storm, autant en intensité qu’en tessiture.
Après les applaudissements de tous, Pierre présente le fil conducteur du spectacle qui tourne beaucoup sur l’improvisation autour de chansons de sa composition ainsi que de reprises anciennes et plus récentes.
Le thème de la chanson suivante, Blue sky torn, est l’étrangeté de la période du Covid, voire son surréalisme (certains nettoyaient les poireaux à l’eau de Javel, ce qui provoque quelques rires dans l’assemblée) sur fond d’histoire d’amour. Quelques accords plaqués, un genre de discussion, de questionnement s’instaure, rallié par le chant. La passion est palpable et la guitare se lance dans un chorus enlevé. Les notes n’ont pas le temps de s’arrêter que déjà les mains se joignent pour une ovation qui en dit long sur le plaisir du public.
Une vieille chanson cette fois de Nina Simone et Billie Holiday ; Tell me more, débutée avec des percussions sur le corps de la guitare et un rythme très enlevé aux airs de flamenco, qui déclenche un enthousiasme général, avant le retour du calme dans le rythme et la mélodie, tout en maintenant parfaitement l’attention du public qui a du mal à contenir ses applaudissements jusqu’à la dernière vibration des cordes.
Le prochain thème, Close to the dream, parle du moment précis où l’on se réveille, loin du début de la journée, mais encore dans les rêves de la nuit comme dans une zone protégée, il règne une grande douceur. Puis une reprise de Ray Charles, nom qui fait réagir certains, sur un bon gros groove, Drown in my own tears. On enchaîne avec Circles in smoke où Pierre assure une belle improvisation de la voix sur la guitare.
La plus vieille des chansons du jour, de Hank Williams est Lost Highway, modernisée par Pierre. Cela interroge quelques personnes qui demandent la date, ce à quoi répond Pierre, « dans les années trente, quarante, du temps de vieux cowboys » provoquant le rire de beaucoup. Il ramène à nouveau la sérénité avec un objet sorti de sa poche, un archet électronique qui par l’émission d’un champ magnétique permet des notes tenues et de belles vibrations, accompagné par la voix bouche fermée.
Nous partons sur Une autre île dans une carrure un peu décalée, de belles harmoniques en arpèges et une belle discussion entre voix et guitare.
La fin du concert sonne, mais c’est sans compter sur le public qui en redemande en scandant, « une autre, une autre ». Pierre revient avec plaisir, cette fois, il s’agit de bonheur et de quiétude intérieure ; bien entendu nous finissons en douceur.
Un moment vraiment particulier, un challenge réussi avec des jeunes et moins jeunes heureux de cette escapade musicale, un plaisir partagé et des autographes signés comme pour prolonger ce moment de grâce que nous a fait vivre Pierre qui a su gérer le concert en fonction des réactions suscitées par sa musique.
Encore un grand merci à Philippe pour cet échange touchant et pour le bonheur qu’il cherche à apporter à tous.