Heureuse surprise pour le concert de la formation du guitariste Anthony Jambon au Jazz club de Grenoble.
Nous avions déjà rencontré et écouté Anthony au Second Souffle (Lyon 1er) il y a des années, et nous savions quel guitariste il était déjà faisant l’admiration de ses potes musiciens, et la mienne comme simple auditeur. Aussi nous voulions nous faire notre idée en venant l’écouter à Grenoble quelques dix ans après ; sachant aussi que la programmation du club est toujours de qualité.
Mais lors de la « balance » nous avons failli partir, tellement les bruits de l’orchestre était assourdissants ‘basse et synthé jouant à l’unisson dans le grave, faisait trembler le sol, mes tympans et me donnait envie de fuir. Et puis comme nous savons qu’avec la présence du public l’intensité sonore s’atténue nous sommes restés.
Bien nous en a pris! Ce jazz rock intergalactique (je ne garantie pas la pertinence de l’étiquette, je veux juste donner une idée) nous a saisi, comme il a saisi le public par toute une série d’évidentes qualités.
D’abord les musiciens sont plutôt virtuoses (Joran Cariou au piano et claviers, Swaeli Mbappé à la basse et à la voix, Martin Wangermé à la batterie et Camille Passeri à la trompette, au bugle et aux bidouilleurs de sons) et les chorus de Anthony sont vraiment somptueux. Ensuite la composition des thèmes et leur mise en place produit un effet de transe, par la répétition des motifs, l’alternance de ces motifs avec des plages de douceur où les arpèges de guitare, ou les pickings, les cascades de notes argentines au piano, et la polyrythmie cultivée avec finesse et efficacité, avec quelques métamorphoses progressives dans les tempis captivent l’attention.
Nous n’en finirions pas de décrire les chouettes combinaisons d’instruments pour tel motif dans tel thèmes (exemple la mélodie à l’unisson à la trompette et à la basse puis au synthétiseur dans Clock où les vertiges de phrases à la diable mais toujours à l’unisson dans Family ou parfois la trompette et le synthétiseur puis plus loin la trompette et la guitare jouent à l’unisson Dans Thunder rain, ce sera plutôt sur fond de marquages rythmiques appuyés au clavier et à la basse, durant un continuum de batterie; les échanges d’instruments qui jouent à l’unisson ou exposent les thème. Parfois le bassiste , le pianiste et le guitariste font des tenues vocales. Ca devrait être bien et beau en CD mais dans la richesse de l’instrumentation et la puissance des instruments, les voix ne se détachent pas clairement; L’ensemble est parfois confus.
Nous n’en finirions pas de décrire les pickings somptueux de guitare (dans Matière noire), et le cristal du piano et de la guitare dans Thunder Rain, sur des harmonies originales et séduisantes.
Ou encore la douceur retrouvée des phrases légères à la guitare, soutenu à la batterie par les balais, dans Day Off (jour de congé), les phrases vertigineuses et à l’unisson de la guitare et de la basse.
Il y a un travail technique remarquable, une mise en place époustouflante, des changements d’ambiances, des ruptures d’atmosphères, un jeu sur les sons avec les machines qui servent aussi bien les claviers que la guitare ou que la trompette, qui nous conduisent dans un univers potentiellement intersidéral.
Les musiciens sont des fans d’Aurélien Barrau, l’astrophysicien. Ca tombe bien , nous aussi. Quand la musique et la pensée se rencontrent, c’est plutôt agréable. Mais pour ne pas tomber dans l’intellectualisme, disons que ce concert a plu aussi à d’autres niveaux. La transe des rythmes des riffs répétitifs a provoqué quelques jouissances très manifestes quasi dansantes, quelques quasi-orgasmes mimétiques, dans l’auditoire. Plus sagement, le public du jazz club a bissé le groupe. Le plaisir fut donc bien partagé.